Cette séance a pour thème « médias et technologies », elle débute par un tour de table. Jean-Marc de Félice commence par résumer son parcours : il fait ses débuts à l’époque de radios pirates. Il inaugure ensuite le démarrage de la chaîne Canal+, puis il devient directeur du développement du réseau de la Cinq. A Radio France, il a en charge l’organisation technique de numérisation des radios locales. Il crée en 2014 sa société de conseil.
En introduction, il évoque les débuts de la télévision. Au départ donc, un émetteur pour une diffusion, d’abord en analogique puis en numérique. Les choses évoluent avec l’arrivée des télécommunications. Aujourd’hui, d’autres modes de consommation de la vidéo (d’autres supports) s’installent. Parmi les conséquences du numérique, on constate un vrai changement dans les processus de fabrication.
Jean-Marc de Félice revient de Las Vegas où s’est tenu le NAB 2015. Un évènement mondial riche de nouvelles expériences, de nouvelles perspectives. Mais aussi une vitrine internationale qui donne une vision globale de l’évolution des technologies dans le monde du broadcast. L’heure est à l’OTT (Over the top) TV : un distributeur de contenus audiovisuels sur l’infrastructure d’accès à internet. Ce nouvel univers permet l’émergence de nouveaux acteurs : Netflix, Youtube, mais aussi Amazon : des géants qui proposent de la distribution de contenus.
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Jean-Marc de Félice nous présente ensuite un panorama des grandes évolutions technologiques qui impactent l’audiovisuel. Le détail de plusieurs innovations
-Le Cloud : consiste à utiliser les services informatiques à distance sans les posséder, une innovation rendue possible par l’évolution rapide de l’informatique, des télécoms et des usages.
Il existe plusieurs niveaux :
- SaaS : les applications (software réseau service)
- PaaS : serveurs + OS (plateformes réseau service)
- IaaS : serveurs
Le cloud offre de gros avantages en termes de souplesse. Cela transforme la diffusion et les usages de consommation mais aussi les outils de production (plus besoin d’infrastructure dédiée). Enfin, cela réduit le « time to market » : un délai désormais plus court pour lancer une offre. La production devient plus rapide, plus souple et coûte moins cher, elle permet, de ce fait, le droit à l’erreur, ce qui devrait avoir un impact positif sur la R&D.
Exemple : Envivio Nuage qui maîtrise de l’ensemble de la chaîne. Il s’agit du même schéma que pour une régie de distribution et le logiciel peut théoriquement se substituer à un diffuseur. Le + : grâce au big data, on a le retour des utilisateurs et donc un suivi de la consommation pour chaque individu
Cette solution propose à l’utilisateur de se détourner de la télévision alimentée traditionnellement. On n’est plus dans le broadcast mais l’unicast. C’est-à-dire de nouveaux entrants (Play TV) vs acteurs historiques.
Une évolution que les chaînes traditionnelles observent de près. Un nouveau système qui n’est pas soumis à autant de règlementation. L’acteur historique américain Harry’s a investi complètement dans le cloud, s’est renommé Imagine. L’avantage : il possède une parfaite connaissance des métiers qu’il sert.
Aujourd’hui, grâce à ces solutions, tout peut être virtualisé (excepté les micros et les caméras).
La tendance : ceux qui possèdent les contenus souhaitent les distribuer eux-mêmes. Exemple : le CIO va créer sa chaîne.
-Cloud DVR : créer un magnétoscope dans le cloud
Extrêmement souple, extrêmement facile : un système grâce auquel les vidéos sont accessibles partout. Force de la recommandation ciblée pour chaque usager. Le + : outil le plus précis qui permettent d’analyser les typologies d’œuvres utilisées.
Des usages qui sont déjà développés grâce au replay mais notons que toutes les émissions ne sont pas disponibles. En comparaison avec l’expérience utilisateur d’un magnétoscope, on est en retrait.
Question de la redevance sur la copie privée car le cloud n’y est pas soumis. Cette innovation provoque un vrai débat : qui rémunère les artistes ? Qui paye quoi ?
-Broadcast vs unicast
Broadcast : je diffuse pour tout le monde. L’émetteur fonctionne pareil peu importe le nombre de récepteurs.
Unicast : chaque device crée une connexion à un serveur ; à chaque fois un flux différent pour chaque récepteur. L’inconvénient : cela finit par charger les réseaux.
Les Télécoms sont en train de regarder s’il est possible de faire du broadcast avec des réseaux télécoms, une avancée qui serait utile notamment pour les programmes de flux (sport, directs…). Exemple : on équipe les stades : des contenus second écran disponibles sur les mobiles avec la diffusion de toutes les caméras divergées
ARCEP / CSA : qui gère si les télécoms font du broadcast ?
Historiquement, en France, le broadcast et les télécoms ont toujours été maintenus séparés (monopole historique de TDF)
Jean-Marc de Félice pense que l’innovation viendra des pays en développement notamment en raison de problématiques économiques car cela coûte cher de créer de nouvelles infrastructures, ils souhaiteront faire évoluer l’existant.
-LTE (long terme evolution) : la nouvelle 4G
Aujourd’hui LTE Broadcast mais demain peut-être la mobile TV ?
-Remote production : on ne déplace plus les moyens de captation, plus besoin de car de production.
Les salles de spectacle vont s’équiper.
-Caméras connectées : en 4G reliées à plusieurs opérateurs
L’objectif est de mutualiser l’existant avec tous les réseaux alentours (réseau des opérateurs, wifi disponibles dans les lieux alentours), pour en faire un signal qui fonctionne. L’avantage du Cloud : vous ne payez que le temps nécessaire, cela diminue considérablement les frais fixes.
-Virtual Newsroom : être plusieurs à travailler sur un même projet sans être physiquement au même endroit
-Drones : Une technologie de plus en plus utilisée avec la constitution d’une banque d’images. Persiste encore la problématique du son.
-Smartphone production : Le smartphone est le nouveau couteau suisse du journaliste. Des sociétés chinoises ont développé de nombreux gadgets pour mieux produire avec son smartphone (améliorer le son, la lumière).
-Live stream : remplacer les moyens mobiles lourds par une agrégation de canaux 4G
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Des innovations technologiques qui permettent également la création d’une voie directe entre le producteur et l’audience : les informations qui remontent peuvent être utiles dans des perspectives de R&D. Des données analytiques auxquelles les producteurs n’ont généralement pas accès. De plus, utiliser les MCN peut être une solution pour tester des programmes sur une audience ciblée et ainsi avoir des retours immédiats et qualifiés sur le format.
Pour Jean-Marc de Félice, le fait générateur de l’évolution des médias, c’est la technologie.